dimanche 25 décembre 2011

Pétition de classement pour la Salle Vermeulen



Note : La pétition est aujourd'hui cloturée et déposée (voir ici). Il n'est désormais plus nécessaire de nous renvoyer des signatures. Merci pour votre aide.

Dans cet article, nous attirions votre attention sur l'ancienne salle de théâtre (Salle Vermeulen) située en intérieur d’îlot au 17 rue Goossens à Schaerbeek. Un projet de transformation en lofts, passé deux fois en Commission de concertation, menace ce bâtiment remarquable datant de 1889. La dernière Commission de concertation du 2 décembre dernier a heureusement remis un avis défavorable au projet, à l’exception notable de la Commune de Schaerbeek. Il s’agit de la seconde demande de transformation de la salle en moins d’un an.
A cette occasion la Commission Royale des Monuments et des Sites (CRMS) a remis un avis défavorable à la transformation de la salle Vermeulen. Une copie de cet avis est disponible en cliquant ici.

Dès lors, afin d’orienter définitivement la ré-affectation de cette salle remarquable vers un projet qui ne dénature pas son intérêt patrimonial, il est nécessaire qu'elle soit protégée. Avec le soutien de l'ARAU, BruxellesFabriques et IEB, Pétitions-Patrimoine a décidé de demander le classement de l’ancien théâtre par une pétition officielle.

Bien qu'il existe des formules de pétitions en ligne, nous sommes obligé de vous faire remplir un formulaire papier car il s’agit de la procédure nécessaire pour que la pétition ait un caractère officiel et que le Gouvernement bruxellois en tienne compte. Alors, si vous désirez nous aider à sauver ce bâtiment, imprimez, remplissez et faites remplir le formulaire de pétition (en suivant les instructions sur sa deuxième page) et renvoyez-le nous par la poste d’ici la fin du mois de janvier à :
Pétitions-Patrimoine, rue du Marteau 19, 1000 Bruxelles.

Merci d'avance pour vos efforts.

Quelques aspects de la Salle Vermeulen :








lundi 12 décembre 2011

Encore une villa uccloise condamnée

En septembre dernier passait devant la Commission de concertation d’Uccle une demande de permis visant à démolir la villa sise au 1421 chaussée de Waterloo. Or cette petite villa du fond de Uccle constitue à nos yeux un témoin précieux de la première urbanisation de ce quartier. Construite au début du XXe siècle, elle est représentative du style des premières villas suburbaines qui ont été construites au pourtour de Bruxelles et des noyaux villageois plus anciens des communes, comme Uccle, encore largement agricoles à cette époque. En découle un style éclectique inspiré par le pittoresque campagnard comme en témoigne la toiture en pignon de la villa. Pour des raisons historiques, il nous paraît dès lors essentiel de préserver ce témoin du début de la mutation urbaine d’Uccle d’une entité villageoise et rurale vers la commune résidentielle intégrée à l’ensemble urbain bruxellois qu’elle est devenue actuellement.

Outre ses qualités historiques, la maison, par son dessin de façade soigné, présente d’indéniables qualités esthétiques. En particulier, on remarquera l’usage intéressant et subtil de la brique, associée à quelques éléments de pierre bleue, qui rythment la façade d’éléments horizontaux et en tempèrent l’austérité. Des éléments plus pittoresques comme le soubassement en moellons, les petites consoles de gouttières en bois, l’escalier de l’entrée principale ou le traitement en berceau des fenêtres s’y ajoutent pour conférer à cette villa une architecture subtile et raffinée. Pour Pétitions-Patrimpoine, cette maison pourrait répondre sans problème à un programme résidentiel de qualité. Nous nous sommes donc opposés à sa démolition lors de l’enquête publique.

Le 1421 chaussée de Waterloo, en attendant la démolition

Hélas, la Commission de concertation a remis un avis favorable au projet de reconstruction plus massif demandé. Il faut ainsi faire une fois de plus le constat qu’à Bruxelles le patrimoine non protégé ou moins remarquable mais significatif est l’éternel laissé pour compte face à des demandes de démolitions. Rien qu’à Uccle, commune qui subit une certaine pression immobilière, alors qu’on avait réussi à sauver de justesse les villas Pelseneer et Cohen dans les années 1990, ces dernières années ont, par exemple, vu disparaître la villa Firwood (Thomas Jasinski, 1909), la belle maison de style Eclectique du 299, avenue Brugmann ou la Maison Adamantidis construite par Jacques Dupuis en 1962 au 57, avenue Blucher.

Pour mémoire, la villa Firwood de style néo-Tudor, aujourd'hui démolie

dimanche 11 décembre 2011

Il faut protéger l’ancien théâtre rue Goossens

Une ancienne salle de théâtre (Salle Vermeulen), située en intérieur d’îlot au 19-21 rue Goossens à Schaerbeek, vient de faire l’objet d’une demande de permis pour la transformer en logements. Ce projet vise à diviser horizontalement et verticalement la salle pour en faire cinq lofts. Hélas, ce projet risque de dénaturer complètement ce bâtiment extrêmement intéressant. Construite par la Société de Saint Vincent de Paul et inaugurée en 1898, la salle Vermeulen est comparable dans sa structure, sa conception et son esthétique aux halles Saint-Géry. La plupart des éléments décoratifs ainsi que des châssis sont conservés. L’intérêt patrimonial du bâtiment tient également dans la volumétrie de son impressionnant espace intérieur. La préservation de ce dernier parait difficilement compatible avec une affectation et une divisions en appartements.

La structure métallique de la toiture avec ses fenêtres permettant l'éclairage de la salle enchâssée en intérieur d'îlot

Vue générale de la salle
Détail de la structure métallique

Depuis plus de 120 ans, la salle Vermeulen a servi d’équipement collectif : théâtre, salle de fête, école de devoirs, bibliothèque, salle de sport… Lors de la réunion de la Commission de concertation, Pétitions-Patrimoine, l’ARAU, IEB ainsi que de nombreux riverains ont demandé le maintien de son affectation publique, dans un quartier qui en a bien besoin, ainsi que la valorisation des qualités patrimoniales de l’immeuble. La Commission de Concertation s’est réunie le 2 décembre et a heureusement remis un avis largement défavorable au projet, à l’exception notable de l’avis minoritaire de la Commune de Schaerbeek.

Il s’agit de la seconde demande de transformation de la salle en moins d’un an, une première demande de permis de même nature ayant été rejetée en juin dernier. Dès lors, afin d’orienter définitivement la ré-affectation de cette salle remarquable vers un projet qui ne dénature pas son intérêt patrimonial, Pétitions-Patrimoine a décidé de demander au gouvernement bruxellois une mesure de protection pour ce bâtiment.

mardi 29 novembre 2011

Préservons l'intégrité de l'immeuble CBR

Pétitions-Patrimoine est préoccupée par le sort de l’immeuble CBR au 185 chaussée de la Hulpe. Il s’agit d’une œuvre très importante d’un point de vue technique et esthétique pour Bruxelles mais aussi pour la Belgique. Cet immeuble si particulier et reconnaissable a été construit en 1967-1970, sous la houlette de l’architecte Constantin Brodzki en collaboration avec Marcel Lambrichs. Il possède une façade unique entièrement réalisée en éléments de béton moulés. Il jouit aujourd’hui d’une large reconnaissance, est cité dans de nombreuses publications et a été sélectionné par le Musée d’Art Moderne de New-York (MoMA) pour son exposition Transformation in Modern Architecture, 1960-1980. Outre sa façade unique, un des intérêts de l’immeuble est qu’il a été conçu pour un client spécifique, de façon globale jusqu’au dessin de chaque meuble et de chaque accessoire.



Il nous a malheureusement été rapporté que l’intérieur du bâtiment qui a pourtant été rénové avec attention par Constantin Brodzki lui-même dans les années 1990, a récemment subi des altérations et que plusieurs meubles d’origines, dessinés par Jules Wabbes spécialement pour ce lieu, ont été enlevés. Nous craignons dès lors que, faute d’une gestion attentive et conforme à l’intérêt architectural et historique de l’immeuble, celui-ci ne subisse une lente dégradation de ce qui fait son intérêt.

Dès lors, nous avons interrogé les experts membres de la Commission Royale des Monuments et des Sites (CRMS) s’ils possèdent des informations concernant la gestion de ce lieu ? Le propriétaire a-t-il fait une demande d’aide en ce sens à la CRMS ?

Mais surtout, dans un souci d’anticipation d’autres modifications malheureuses, nous avons soulevé la question de savoir s’il ne serait pas temps d’envisager le classement de ce chef d’œuvre global ? Un classement aujourd’hui intègrera la rénovation de qualité effectuée dans les années 1990 par Constantin Brodzki (petite visite ici). Il s’agirait de s’assurer ainsi qu’une rénovation future sera encore aussi respectueuse des qualités de l’immeuble et de préserver les éléments d’origine significatifs de sa conception originelle.

vendredi 14 octobre 2011

Immeuble RTT : la réponse de la Ministre

Comme indiqué dans notre article précédent, nous avons interrogé par écrit la Ministre de tutelle de la SDRB quant à la possibilité « de déplacer légèrement la voirie, de l’ordre de 4 mètres […], modification, de plus, recommandée par le rapport d’incidence ». Que nous répond-elle ?

Son courrier nous dit en gros que la nouvelle voirie démolira une partie du bâtiment et que, dès lors, cela ne vaut plus la peine de garder le reste du bâtiment. Elle semble donc ne pas avoir compris notre question et a répété l’argumentation servie au Parlement bruxellois à Serge de Patoul qui s’inquiétait lui aussi de la destruction de l’œuvre de Saintenoy.

Soucieux de réparer cette incompréhension, nous avons, dès la réception de cette réponse, pris notre téléphone afin de reformuler oralement notre question. Le Cabinet nous a, très gentiment, répété que oui, c’était dommage mais que bon, voilà, le projet était un équilibre entre une partie « activités économiques » et une partie « logements ». Le hic serait que la nouvelle voirie va servir de séparation entre ces deux parties. Devant notre manque de compréhension du problème, notre interlocuteur nous fait part du calcul suivant : « un recul de 4 mètres fois 100 mètres (la longueur de la nouvelle voirie) égale 400 mètres carrés qui passeraient d’une fonction à l’autre. », CQFD.

Il apparaît ainsi que le Cabinet Huytebroeck ne semble pas avoir (bien) lu l’étude d’incidence soumise à l’enquête publique lors de la demande de permis de lotir. Comme nous (on n’a rien inventé), l’étude préconise l’adaptation du tracé de la nouvelle voirie pour préserver l’ancien bâtiment RTT. Or, la proposition incluse dans l’étude d’incidence montre bien que la modification du tracé de la voirie (léger changement d’angle et adaptation du carrefour avec la rue de Molenbeek) n’a qu’un impact négligeable sur la surface dévouée à la zone d’activités économiques. On lira utilement à la page 127-128 de l’étude : « Cette hypothèse nécessite une adaptation du tracé de la voirie projetée à hauteur du bâtiment. Une simplification de la voirie (suppression du stationnement latéral et réduction des trottoirs à 1,5 mètres) permet une configuration du carrefour rationnelle. Elle nécessite toutefois de prévoir un trottoir dans la partie "expansion économique" (Green Bizz)». Comme on peut le voir sur le schéma, ce morceau de trottoir ne devrait « mordre » qu’une poignée de m2 de la zone Green Biz… pas de quoi fouetter un chat (où abattre un bâtiment de qualité en bon état). Sans compter que, si on le souhaite, il est parfaitement possible de réaffecter la partie basse de l’ancien immeuble RTT en une fonction « économique ».

Extrait de l'étude d'incidence : comme on peut le voir, le trottoir dévié pour sauvegarder l'ancien bâtiment RTT (en orange) ne prendrait qu'une poignée de m2 du côté "zone économique" du pointillé orange.


En réalité, nous pensons nous trouver face au cas, récurant à Bruxelles, du projet immobilier qui a été pensé en chambre sans tenir compte du bâti existant. Un projet qui nous semble malgré tout amendable avec un peu de bon sens pour en améliorer l’aspect « développement durable » puisqu’on conserverait un important patrimoine architectural en bon état (selon l’étude d’incidence du projet). Mais, suite à la réponse du Cabinet Huytebroeck un doute nous étreint : la vision du monde qu’il révèle considérerait-t-il les lignes droites comme un élément indépassable du projet ? La vision du Baron Hausmann et du panoptique doivent-ils forger la vision de la ville pour les siècles à venir ?

Allez, un petit effort d’imagination et une petite courbe, un petit tournant pour sauver un bâtiment, ce ne devrait pas être si compliqué à mettre en œuvre !

dimanche 11 septembre 2011

L'immeuble RTT menacé par un projet « durable »

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Il y a quelque temps déjà que Pétitions-Patrimoine s’inquiétes du sort de l’ancien bâtiment de la RTT sis rue de Molenbeek 198. Ce bâtiment est en effet situé à Laeken dans un îlot en grande partie vide, délimité par la rue de Molenbeek, la rue Claessens, la rue du Tivoli et la rue Dieudonné Lefèvre. Ce vaste îlot situé derrière Tour & Taxis fait l’objet d’un projet de lotissement d’un quartier « durable » mené par la SDRB. Le projet prévoit la création de quatre voiries qui découpent le site en îlots plus petits et a été l’objet d’une étude d’incidence débouchant sur une demande de permis de lotir passé en concertation le 4 janvier 2011.

Vue générale du site depuis la rue Lefèvre avec, au fond, l'arrière du bâtiment RTT

Par on ne sait quel manque d’attention ou volonté délibérée, il apparaît que, malgré l’espace disponible sur l’ensemble du site, les concepteurs du projet sont parvenus à tracer une des voiries de sorte qu’elle ampute de quatre mètres l’ancien immeuble RTT, impliquant sa démolition, au moins partielle. Or, cet immeuble construit à partir de 1946, suivant les plans de l’architecte Jacques Saintenoy fait une synthèse intéressante d’éléments du style moderniste de la fin des années 1930 (fenêtres en hublots, utilisation extensive de la brique jaune…) et de certains éléments stylistique qui se développeront plus typiquement dans l’après-guerre (dessin de l’encadrements des portes, certaines ferronneries).

Vue depuis la rue de Molenbeek : l'imbrication des parties basse et haute du bâtiment

L’intérêt du bâtiment tient, pour partie, dans la personnalité de son architecte dont l’œuvre est encore peu documentée mais dont l’inventaire scientifique en cours de réalisation par la DMS révèle une partie des créations. Ces bâtiments datent essentiellement de la fin des années 1920 à la fin des années 1930. En outre, Jacques Saintenoy a participé à la construction de la « nouvelle » Gare du Nord au début des années 1950. Le bâtiment RTT de la rue de Molenbeek constitue donc une œuvre de maturité pour un architecte intéressant, représentatif du courant moderniste à Bruxelles, dont une partie de la production reste sans doute encore à découvrir faute d’inventaire extensif du patrimoine en Région bruxelloise.

La « nouvelle » Gare du Nord juste après sa construction

Il faut aussi relever l’intérêt architectural spécifique au bâtiment RTT. En effet, celui-ci offre une volumétrie particulière qui, partant de fonctions différentes, imbrique un volume bas dédié originellement à des fonctions économiques (bureau et restaurant) dans un volume haut dont les étages supérieurs sont affectés au logement. Cette conception en deux volumes dissymétriques et imbriqués concourt à donner une image forte à l’immeuble et à en rendre l’organisation interne très lisible depuis la rue. L’imbrication et le contraste des deux parties de l’immeuble s’accompagnent d’un jeu subtil dans le dessin de la façade avec, notamment, de légères saillies ou retrait des différentes parties.




Malgré cela, le permis de lotir demandé par la SDRB qui a reçu un avis favorable de la Commission de concertation en dépit les conclusions du rapport d’incidence du permis de lotir qui préconisait le maintien du bâtiment et la révision du permis en conséquence (léger déplacement de la voirie, réaffectation de l’immeuble).

Depuis lors, cette démolition a été évoquée par deux fois au Parlement bruxellois. En avril dernier, le député Serge de Patoul, déplorant cette démolition, a tout d’abord interrogé Charles Picqué sur son caractère inéluctable. Le Ministre-Président lui a répondu que « le bâtiment est en très mauvais état et que sa stabilité pose question. ». Etrange argument puisque le rapport d’incidence du permis de lotir, datant d’août 2010, décrivait ce bâtiment comme « Globalement, l’immeuble présente un état structurel bon et sain. Seul un petit problème d’humidité est présent au droit du raccord entre la partie horizontale du bâtiment et la partie plus haute. Celui-ci pourrait être facilement solutionné par une réparation en toiture et en façade. » et, dans ses conclusions, recommandait de modifier légèrement une des voiries prévues afin d’éviter de le démolir. On serait étonné qu’en quelques mois un bâtiment en béton armé d’une telle taille se dégrade au point d’en devenir instable.

Face à la contradiction évidente entre les arguments de M. Picqué et le rapport d’incidence, le député revint donc à la charge avec une nouvelle question parlementaire, cette fois auprès de la Ministre ayant la tutelle sur la SDRB, Evelyne Huytebroeck. Dans sa réponse, celle-ci n’envisage à aucun moment la possibilité de dévier la future voirie de quelques mètres pour sauver le bâtiment.

Pétitions-Patrimoine a donc décidé d’interroger également Madame la Ministre sur la possibilité de revoir le permis de lotir afin de déplacer de quelques mètres la future voirie afin de préserver l’ancien bâtiment RTT et d’éviter la création en pure perte des tonnes de gravats de sa démolition car il est aussi de notre souci que le sens du mot « durable » dont est qualifié le projet « Tivoli » ne soit pas ridiculisé par une voirie mal dessinée sur un plan. Le courrier vient de partir... la suite au prochain numéro.



lundi 29 août 2011

Ceci pourrait nous coûter un pont… ou plus


Face à la montée des prix du pétrole, à la saturation des réseaux routiers et, d'une manière générale, à une prise de conscience de l'impact écologique qu'a le transport de marchandise par la route à une vaste échelle, des réflexions sont menées afin de mettre en place des alternatives au tout-camion. Une de ces réflexions mène vers la voie d'eau et, à Bruxelles, il se trouve que nous sommes reliés au très actif port d'Anvers par le canal de Willebroeck, un canal qui devient «de Charleroi» et se prolonge vers la Wallonie et qui, potentiellement, nous met en relation avec le Nord de la France jusqu'au bassin parisien. Il ne s'agit que d'un potentiel car, actuellement, l'usage du canal de Charleroi a ses limites.

Aujourd'hui, la péniche classique transportant du vrac au raz de l'eau se voit en partie marginalisée face au transport fluvial par conteneurs qui est d'ors et déjà la norme du transport international. Le conteneur, avec ses dimensions standardisées, permet un transbordement efficace par grue entre le paquebot, le train, le camion… Ainsi, dans son Masterplan le Port de Bruxelles explique que «La conteneurisation et le défi pour les ports maritimes de constituer un réseau performant de ports intérieurs offrent ainsi une opportunité de développement pour le port de Bruxelles».

Mais, à Bruxelles, cette opportunité de développement bute sur un obstacle majeur… où plutôt, sur cinq obstacles majeurs. En effet, en amont du pont Van Preat, la plupart des ponts bruxellois n'offre plus qu'une hauteur libre inférieure aux normes européennes prévues pour permettre le passage de bateaux portant jusqu’à trois niveaux de conteneurs. Par ailleurs, le canal devient plus étroit et est d'une capacité moindre.

C'est un vieux problème connu et, si dans les années 1980, on a renoncé à élargir le canal de Charleroi et, ce faisant, à raser une bonne partie du front bâti du vieux Molenbeek le longeant, faire sauter les ponts bruxellois reste une idée en vogue. Ainsi, Brigitte Grouwels, Secrétaire d'État en charge du Port de Bruxelles, a déclaré le 16 juin 2010, lors d'un séminaire sur le sujet: «D'ici à 10 ans, tous les ponts devront avoir une hauteur libre d'au moins 5,25 mètres de manière à permettre le passage de bateaux à double chargement de conteneurs. (…) D'ores et déjà il convient donc de prévoir la nécessité de surélever nos ponts à une hauteur libre de 7 mètres afin de permettre le passage de bateaux ayant 3 niveaux de conteneurs.».

La mise à hauteur des ponts bruxellois risque d'être très destructrice, d’autant que plusieurs ponts font clairement partie de notre patrimoine. On pense en particulier au pont de la place Sainctelette avec ses divers ornements (balustrades, pilastres…) Art Déco, construit par l'architecte Rogister et orné de statues dues à E. Wijnants.

Une des statues du pont de la place Sainctelette

En face, Monsieur a aussi fière allure

Il y a aussi le pont de la porte de Flandre qui possède d’étonnants pilastres Art Déco aux motifs d'inspirations exotiques,

Une étrange créature garde le pont de la Porte de Flandre

Le pilastre de droite n'étant pas moins étonnant

ou encore le pont métallique du chemin de fer entre Cureghem et la gare de l'Ouest dont le principe constructif est particulièrement intéressant.

Un autre problème sera la manière dont on arrivera, depuis les berges, à amener le trafic routier à la hauteur des nouveaux ponts à 7m. Soit on établira des ponts levants ou basculants, avec interruption de tout trafic routier entre les deux berges dès qu'un bateau passera. On imagine la pagaille entre la chaussée de Gand et la rue Dansaert avec ses nombreux bus. Cela paraît d’autant moins praticable qu’on espère une augmentation du trafic fluvial justifiant ces investissements. Soit on devra construire des rampes d'accès en pente bien au delà des berges et ce sont des destructions importantes du bâti alentour qui auront lieu.

Une question essentielle se pose donc: Bruxelles, ses habitants, son patrimoine… doivent-ils faire les frais de ces chantiers qui, partant d'une bonne intention, s'avèrent extrêmement destructeurs ? À ce stade, on se demande si le jeu de la «conteneurisation» du canal en vaut la chandelle et s’il ne vaudrait pas mieux s’appuyer sur le transfer vers le rail des conteneurs du côté de Schaerbeek Formation. Il nous semble qu’un débat sur la question doit être porté par la Région vers les habitants, au delà de quelques séminaires et rencontres entre spécialistes. D'autant que, au final, il ne fait aucun doute que le coût de ces projets est pharaonique et que, avant que le premier bateau à trois niveaux de conteneurs ne traverse Bruxelles, du Nord au Sud, beaucoup d'eau aura coulé sous les ponts du canal.

dimanche 28 août 2011

Quel avenir pour les prisons bruxelloises ?

En janvier 2009, le Ministre de la justice, Stefaan De Clerck a présenté son Master Plan pour les prisons du Royaume. Celui-ci prévoit, entre 2012 et 2016, la suppression d'un certain nombre de prisons existantes pour les remplacer par d'autres à construire sur de nouveaux sites. Pour Bruxelles, il s'agira de construire un nouveau complexe pénitentiaire à Haren et de fermer les prisons de Saint-Gilles, Forest et, sa voisine, Berkendael.

Il semble que toute cette opération se soit décidée sans qu'il y ait eu une quelconque réflexion préalable sur l'avenir des sites ainsi délaissés. M. Picqué, en tant que Ministre-Président bruxellois, a fait part de ses craintes quant aux intentions de la Régie des Bâtiments (propriétaire des lieux): «La crainte de la Région, c'est que le fédéral semble pressé de vouloir mettre les terrains sur le marché. (…). L'administration pénitentiaire est, comme l'Etat belge, soucieuse d'avoir un certain gain de la réalisation du terrain de Saint-Gilles et Forest.» (Le Soir, 7 juin 2010). Alors, va-t-on voir se mettre en place une spéculation effrénée par l'État fédéral sur ces sites et leur dépeçage en règle par les promoteurs immobiliers?

Pourtant, il est évident que certaines prisons font partie du patrimoine remarquable de notre Région. Prenons la prison de Saint-Gilles. Elle fut construite entre 1878 et 1884 par les architectes Joseph Jonas Dumont et François Derré. Les plans s'inspirent des principes les plus modernes de l'époque (le principe du panoptique), importés d'Angleterre et des Etats-Unis par le criminologue et premier inspecteur général de l'administration pénitentiaire, Edouard Ducpétiaux. La prison de Saint-Gilles prend place dans l'aménagement général du quartier de l'Hôtel de Ville et son imposante façade de style Tudor est particulièrement remarquable, tout comme le noyau central qui commande les cinq ailes du bâtiment principal. Nous trouvons là un des ensembles pénitentiaires les mieux préservés de la fin du XIXe siècle.

La prison de Saint-Gilles au début du XXe siècle - une image encore largement d'actualité

Il semble que l'intérêt patrimonial des établissements bruxellois n'ait pas échappé à nos édiles. Ainsi Magda De Galan, Bourgmestre de Forest, a déclaré que «Il n'est en tout cas pas question de raser ni la maison d'arrêt, ni la prison pour femmes» (Le Soir, 3 février 2010). Tout en reconnaissant la valeur des biens, Charles Picqué est moins affirmatif: «Je suis aussi circonspect quant à la démolition des bâtiments actuels. Des éléments patrimoniaux sont à conserver mais pas tout.» (Le Soir, 7 juin 2010).

Pour Pétitions-Patrimoine, il convient en tout cas d'éviter les erreurs du passé où, face à de gros projets de réaménagements, les autorités publiques ont «oublié» de prendre préalablement en compte les dimensions patrimoniales des lieux et où le débat sur le patrimoine s'est fait après coup pour essayer de sauver ce qui pouvait l'être face à des promoteurs invoquant l’absence de protection légale (cfr la saga Music City à Tour et Taxis par exemple). Ici, la Région doit prendre le taureau par les cornes tant qu'il est temps et mettre en place les études et mesures de protection du patrimoine nécessaires avant que l'on vide les lieux et envisage leurs usages et réinvestissements futures.